Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

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Farde
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Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par Farde » il y a 4 ans

Salut à tou.te.s,

Je suis très heureuse de vous rencontrer. J’ai décidé de poster ici pour avancer un peu dans ma vie ; celle-ci est de plus en plus belle mais j’ai toujours l’impression de « subir » ma sexualité plutôt que de la vivre – du moins, la plupart du temps. J’espère que mon récit ne semblera ni trop sombre, ni trop nerveux. Pour être honnête, j’en ai bavé avec ces questions : angoisses obsessionnelles, dépression chronique… Mais aujourd’hui je me sens bien plus forte : ça fait des années que je suis dans ce merdier et je n’y comprends toujours rien, alors autant en rire. Je vais essayer de ne pas être trop longue, mais je ne vous garantis rien. Pour faire court, je trouve mon cas totalement incohérent.

Tout a commencé autour de mes 13-14 ans. Autour de moi, on parlait de plus en plus d’homosexualité, car c’est l’âge où certain.e.s dévoilent leurs préférences. Petit à petit, une angoisse s’insinue en moi : et si j’étais lesbienne ? A cette époque, rien ne pouvait m’indiquer la plausibilité d’une telle hypothèse : j’étais régulièrement attirée par des garçons, et seulement par des garçons. Mais, loin de s’en trouver calmée, mon homophobie intériorisée (appelons un chat « un chat ») n’a fait que s’accroître et prendre des proportions démesurées. Je me mets à penser que, si j’angoisse, c’est bien parce qu’il y a quelque-chose, une homosexualité latente ; je regarde les filles pour vérifier que leur vue ne provoque aucun effet physiologique en moi. Mais rien ne parvient à me rassurer bien longtemps – et, lorsque je n’ai pas peur d’être lesbienne, j’ai peur de le devenir plus tard. Avec le recul, j’ai fini par penser que tout ceci ressemblait à un TOC (ce qui est probable car j’avais des antécédents). Mais je ne peux en être sûre.

Cependant, l’angoisse se calme l’année suivante, car je rencontre un garçon qui me plaît beaucoup. Tout est beau, il dit qu’il m’aime aussi, je suis amoureuse. Mais, au bout de quelques semaines, il m’en fait voir de toutes les couleurs et joue avec mes émotions. C’est une personne toxique et je le quitte douloureusement, pour qu’il cesse de me faire souffrir. Auparavant, j’avais eu deux courtes relations avec des garçons qui m’avaient abandonnée comme une malpropre.

Quelques mois plus tard, mon homophobie-intériorisée-obsessionnelle revient. D’autant plus que, cette fois, j’ai fait un ou deux rêves érotiques avec des femmes dedans. Ca commence à devenir vraiment insupportable et je fais des crises d’angoisse. Pourtant, je veux juste vivre ! Dans le fond, je m’en fiche un peu de mon orientation sexuelle – mais il y a une peur irrationnelle derrière tout ça, et je ne peux la maîtriser. Puis débute une longue série de schémas qui ne cesseront de se répéter jusqu’à maintenant. Alors même que mes angoisses me rongent, je rencontre un jeune homme qui me plaît. Je fantasme sur lui, je nous imagine tous deux dans un lit, je suis excitée. Il se trouve que je lui plais aussi. Mais, dès que je prends acte de cette réciprocité, je me mets à paniquer grave. Je me dis que ça ne va jamais marcher, qu’en vérité je suis lesbienne, que je suis en train de m’engager dans un piège. Pourtant, je me rends au premier rendez-vous, totalement stressée, la boule au ventre. Ses baisers parviennent à me détendre, je passe le meilleur moment de ma vie. Je le désire. Je me sens totalement à ma place, je ne voudrais être nulle part ailleurs. Il provoque des sensations formidables en moi. Et puis je rentre chez moi et, là, rebelote : je me mets à douter de tout. Je me dis que je ne l’aime pas vraiment, que je ne suis pas vraiment attirée par lui, que je suis en train de me mentir à moi-même. Je replonge dans l’angoisse. Je tente de me souvenir des moments que j’ai passés avec lui, mais je ne parviens pas à accéder au contenu émotionnel et sensitif de ces souvenirs : je sais que je l’ai embrassé, qu’on s’est frottés l’un contre l’autre ; je sais que j’ai aimé ça, que j’ai ressenti des choses extraordinaires – mais ces choses-là, ce qu’elles étaient vraiment, dans leur contenu même, je n’arrive pas à les évoquer en moi. Et puis je pars en stage, où je rencontre des personnes sympathiques ; je suis détendue, heureuse. Si bien qu’un soir, en pensant à mon ami, je ressens un formidable désir pour lui ; je brûle, et c’est sans doute la première fois que je brûle ainsi. Quelques semaines plus tard, pourtant, je romps car j’ai rencontré un autre homme qui me plaît davantage.

A partir de là, ce cycle infernal n’a cessé de se reproduire : je rencontre un homme qui m’attire intensément, y compris sexuellement (je veux dire par là que je le désire, que je nourris des fantasmes sexuels à son propos) ; puis j’apprends que c’est réciproque, et là je panique complètement ; mes émotions et mes désirs se trouvent donc totalement bloqués, j’ai l’impression de ne plus aimer ni désirer cet homme, et les fantasmes sexuels s’en vont ; je me pose des questions obsessionnelles sur mon orientation sexuelle, j’essaie à tout prix de me mettre dans une case, j’ai une peur irrationnelle de me mentir à moi-même ; lorsque je suis avec cet homme, mes angoisses s’envolent presque totalement, je vis des moments extraordinaires et, souvent, des relations sexuelles satisfaisantes (en tout cas en début de relation, ou lorsque je suis en vacances et détendue) ; puis lorsque je suis loin de cette personne, les angoisses reviennent et les émotions s’en vont. Ces derniers temps, je n’ai plus vraiment d’angoisses (youpi!) car j’ai appris à les gérer, mais je n’ai toujours pas d’émotions liées à l’amour ou au désir, et je n’arrive pas à accéder au contenu agréable de mes souvenirs concernant la personne avec laquelle je suis en couple. Ces émotions reviennent lorsque je suis avec la personne mais, malheureusement, elles restent définitivement ancrées dans le présent et m’échappent dès que je suis ailleurs.

Juste une phobie de l’engagement avec des angoisses obsessionnelles concernant l’orientation sexuelle, me direz-vous. Sauf que :
- Lorsque je ne fantasme pas sur un homme que j’ai rencontré et avec qui j’ai un peu échangé, mes fantasmes sexuels sont quasi-exclusivement lesbiens. (J’ai eu un fantasme hétéro une fois. J’avais lu un livre érotique et puis j’ai fantasmé pendant huit heures dans le bus. J’ai dû aller me masturber plusieurs fois à la station service. C’était cool mais ça ne s’est pas reproduit souvent. En fait, je crois que ça ne s’est jamais reproduit.) J’ai ces fantasmes lesbiens depuis plusieurs années maintenant, et j’ai fini par les accepter sans les juger. Il y a trois-quatre ans, j’ai découvert la masturbation et ce sont ces fantasmes qui m’ont servi de principal support depuis ce moment-là. Lorsque ça a commencé, j’ai trouvé ça chouette, je me suis dit que je commençais à devenir un peu active dans ma sexualité, et que j’étais peut-être lesbienne mais que je m’en fichais tant que ça me donnait du plaisir. Sauf que j’ai continué à être follement attirée par des mecs, sans même le vouloir (il me semble). Et à retomber dans le cercle vicieux dont je vous ai parlé. Côté filles, je n’ai jamais trouvé personne avec qui j’aie eu envie de réaliser mes fantasmes. Je ne sais pas si je me bloque toute seule ou quoi, mais je n’ai jamais eu d’attirance pour une vraie fille dans la vraie vie. Honnêtement je pense que je devrais essayer, mais je n’ai pas envie de me faire « initier » par une fille avec qui je n’ai pas spécialement le feeling, et je ne souhaite pas recourir aux sites de rencontres.
- J’arrive extrêmement mal à fantasmer sur un corps d’homme juste en le visualisant. Pour ressentir du désir, il faut qu’il s’agisse d’un homme que j’ai rencontré et qui me plaît. Le corps masculin en lui-même, le rapport hétéro en lui-même, ce sont des choses qui me parlent assez peu. Ce qui me chagrine un peu, c’est que je suis souvent attirée par des hommes qui aiment le plaisir, le vin, le sexe, et lors de la phase de séduction je me dis que je peux être « à la hauteur ». Mais dès que les angoisses arrivent et que les émotions/désirs disparaissent (du moins par intermittence), je me sens totalement à côté de la plaque concernant la sexualité – car j’ai une sexualité active, mais mon imagerie érotique est remplie de fantasmes lesbiens. En résultent une certaine perte de confiance en moi, et une peur de ne pas pouvoir satisfaire les hommes qui me plaisent sur le long terme.

Bref, vous comprendrez qu’avec tout ça, ça fait belle lurette que je n’essaye plus de me mettre dans une case. Je considère mon orientation sexuelle comme indéfinie, et ce n’est pas tellement un problème pour moi. Mon problème, c’est la difficile cohabitation d’attirances très fortes pour des hommes uniquement, et d’un imaginaire érotique quasi-exclusivement lesbien. Cette cohabitation contribue à me faire reproduire un schéma anxiogène, duquel j’ai l’impression de ne pas vraiment pouvoir sortir. Et je sens qu’il y a une contradiction fondamentale à la racine de tout cela, mais je ne sais pas de quelle manière la résoudre. Aujourd’hui, je suis bien plus forte qu’avant et j’en ai un peu assez d’avoir peur, de subir les choses. Je me suis trop empêchée de vivre. Heureusement, j’ai beaucoup d’énergie et, à présent, j’arrive à rire de cette situation (c’est tout ce que je peux faire pour l’instant). Néanmoins, c’est un rire un peu auto-dérisoire, car je dois reconnaître que ce cercle vicieux sape ma vie sexuelle et amoureuse, et m’empêche de vivre celle-ci correctement.

Si vous vous reconnaissez un peu dans ce que j’ai écrit, ou si vous avez déjà vécu des expériences partiellement similaires, n’hésitez pas à m’en faire part, je prends TOUT !

Merci d’avance !

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TiProust
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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par TiProust » il y a 4 ans

bonjour Farde :)
tu expliques tout ça très bien, finalement, comme si tu connaissais déjà la réponse :wink: (boutade)
plus sérieusement, et sans aucune prétention à détenir de réponse, tant les histoires individuelles varient d'un cas à l'autre, je te livre ce que ton récit m'inspire en première réaction.

Déjà, tu sembles exprimer très franchement le fait que la sexualité est, pour toi, quelque chose non seulement d'important, mais je dirais presque de "vital", d'où peut-être ce besoin plus fort que chez d'autres personnes d'être 1) certaine du bon partenaire (NB : je ne préjuge pas du genre, c'est neutre) 2) rassurée sur le fait que tu ne te "trompes" pas toi-même sur ta propre orientation.

Se poser cette question me paraît plutôt une bonne chose, car pour ne pas l'avoir fait moi-même à ton âge ou peu s'en faut, j'ai payé cher cette esquive. Mais elle ne doit pas, si possible, te faire souffrir excessivement.

Pour essayer de te donner une hypothèse (et je peux évidemment me tromper totalement), tu as peut-être un niveau d'attente affective et sexuelle très élevé (j'associe les deux volontairement). C'est souvent très compliqué à vivre car on ne tombe pas toujours sur un/e partenaire qui soit au même diapason. C'est aussi souvent mal compris et trop facilement associé à une forme de désordre, ça peut faire un peu peur, alors que ça n'est en réalité qu'un trait de tempérament, comme certains sont gros dormeurs ou pas :) .

Peut-être ne trouves-tu pas pour le moment la personne qui pourrait être sur ton diapason. Tu as vécu plusieurs expériences avec des hommes différents, certaines étaient visiblement, au moins en partie agréables, mais pas au point de lever tes doutes. Il n'est pas illogique, de ce fait, que tu poses des questions sur l'attirance homosexuelle, perçue comme étant la vraie solution, qui revient en boucle sans toutefois déboucher sur une expérience concrète.

A ce stade-là, j'ai presque envie de dire que tu ne seras sans doute pas facilement apaisée tant que tu ne te seras pas fait, par toi-même, une idée. Peut-être seras-tu déçue, peut-être trouveras-tu au contraire un diapason avec une femme. Il me semble en tout cas que tant que tu resteras sur un schéma de fantasme hyper-puissant, il te sera difficile de trouver l'équilibre que tu recherches, d'autant que ça peut, par la suite, devenir très compliqué à gérer dans l'hypothèse par ex où tu t'installerais dans une relation durable avec un homme. Donc, je dirais que ça vaut largement la peine (à condition que tu te sentes pleinement à l'aise pour le faire) d'explorer ce côté-là.

En espérant que ça puisse amorcer un début de réponse à tes questions.

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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par Bixy » il y a 4 ans

J'ai lu avec attention ton témoignage et tout comme mon camarade TiProust, je pense que tu devrais explorer concrètement ton côté lesbien. Pas n'importe comment bien sûr, mais ça tu le dis déjà très bien toi même.
En tout cas ton récit traduit assez bien ton mal être et tes angoisses, et j'espère que tu vas pouvoir avancer et parvenir à vivre pleinement ta vie affective autant que sexuelle, sans l'angoisse permanente de faire fausse route. On a tous des doutes, à différents moments de notre vie, et rien n'est jamais figé même si parfois on peut le croire, mais dans ton cas ces doutes t'angoissent, et tu dois trouver pourquoi, ou du moins les atténuer et peu à peu t'en libérer.
Bixy

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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par Farde » il y a 4 ans

Salut TiProust, merci beaucoup pour ta réponse à la fois sympathique et apaisante. Je vais rebondir dessus pour dérouler le fil.
TiProust a écrit :
il y a 4 ans
bonjour Farde :)
tu expliques tout ça très bien, finalement, comme si tu connaissais déjà la réponse :wink: (boutade)


Plusieurs années d'angoisses obsessionnelles à devoir gérer plus ou moins seule, ça développe beaucoup le sens de l'introspection. Et la connaissance de soi du coup ;)
TiProust a écrit :
il y a 4 ans
Déjà, tu sembles exprimer très franchement le fait que la sexualité est, pour toi, quelque chose non seulement d'important, mais je dirais presque de "vital", d'où peut-être ce besoin plus fort que chez d'autres personnes d'être 1) certaine du bon partenaire (NB : je ne préjuge pas du genre, c'est neutre) 2) rassurée sur le fait que tu ne te "trompes" pas toi-même sur ta propre orientation.


C'est marrant que tu évoques cette idée de vitalité, car j'y ai beaucoup pensé ces derniers temps. Je ne dirais pas que le sexe est vital pour moi - du moins, je n'en sais rien ! J'ai été élevée par des parents ultra-stressés, qui ne laissaient pas de place à l'imprévu. Tout devait être planifié, bien comme il faut, bien contrôlé. J'ai vécu dans la peur. J'ai eu peur des films, peur des sons, peur des images, peur des évènements, peur des gens, peur des parcs d'attraction, peur des sensations trop fortes (hypersensible), peur de mes émotions. Peur de lâcher le contrôle. Peur de la sexualité du coup ? Bref, un peu morte à l'intérieur. Mais pas totalement : j'ai toujours eu une force en moi, une énergie bouillonnante, une curiosité indécrottable. Une force vitale ? J'aime explorer, découvrir. Je me suis éveillée tard à ma sensualité. Je me suis barrée de chez moi à 17 ans, j'en avais besoin. J'avais besoin de faire exploser toutes ces barrières faites d'angoisse et de peur, qui ne me correspondaient pas. J'ai découvert que l'érotisme, pour moi, est partout : dans la musique que j'écoute et que j'apprécie, dans les moments où je danse comme une déchaînée en boîte, dans le vin que je bois avec mes amis, et même dans l'intellectualité d'une discussion. Cela m'a beaucoup aidée au moment où j'ai voulu surmonter mes obsessions concernant la sexualité, je me suis dit : "Tu n'es pas qu'un être sexuel. Tu aimes danser, dessiner, parler ; ton énergie vitale, tu peux la trouver partout. Donc va la trouver ailleurs !" Cela m'a permis de me concentrer sur autre chose, de reprendre confiance en moi et d'apprécier la vie en-dehors de la sexualité qui, à cette époque, m'angoissait trop pour que je puisse prendre du recul. Et donc, trouvant de l'érotisme partout, je me suis rendu compte que je pouvais me passer assez bien de rapports sexuels. Je peux me contenter d'un peu de masturbation de temps en temps, tout en appréciant pleinement la vie, ma vie. Mais ça ne m'empêche pas de tomber régulièrement amoureuse... Quoiqu'il en soit, je conserve une certaine fascination pour le sexe. C'était tabou chez moi, dans ma famille et avec mes amis. Mais quand j'en vois comment certain.e.s auteur.e.s en parlent, comment certaines personnes "ordinaires", maintenant, en parlent, ça me gêne un peu et m'excite à la fois. Et, tout comme j'ai fait tomber la peur qui entourait la danse, ou la musique, ou la sociabilisation, j'ai envie de faire tomber la peur qui entoure ma sexualité. Donc je ne sais pas encore si le sexe est vital pour moi ; pour l'instant, c'est la fascination que je nourris pour le sexe qui est vitale - et elle l'est justement parce qu'elle m'incite à sortir de la peur, qui est synonyme de mort. Tu vois ce que je veux dire ?
TiProust a écrit :
il y a 4 ans
Pour essayer de te donner une hypothèse (et je peux évidemment me tromper totalement), tu as peut-être un niveau d'attente affective et sexuelle très élevé (j'associe les deux volontairement). C'est souvent très compliqué à vivre car on ne tombe pas toujours sur un/e partenaire qui soit au même diapason. C'est aussi souvent mal compris et trop facilement associé à une forme de désordre, ça peut faire un peu peur, alors que ça n'est en réalité qu'un trait de tempérament, comme certains sont gros dormeurs ou pas :) .


Je pense que ton hypothèse est juste. J'ai été biberonnée à une vision totalement idéalisée de l'amour et de la sexualité, et je suis moi-même très perfectionniste. Si bien que j'ai des attentes très élevées vis-à-vis des autres, mais aussi de moi-même. D'ailleurs, quand je suis soudainement attirée par un homme, ça se passe toujours de la même façon. J'ai d'abord des papillons dans le ventre, j'y pense sans cesse, je fantasme sans cesse, je ressens les meilleures émotions et sensations du monde, et puis au bout de quelques jours je me mets à douter. Exigences vis-à-vis de l'autre : "Qu'est-ce que tu es en train de faire, pourquoi tu fantasmes autant sur lui ? Tu ne le connais pas si bien et, si ça se trouve, il n'est pas du tout comme tu l'imagines. Peut-être même que, sous ses dehors sympathiques, se cache un véritable connard !" Exigences vis-à-vis de moi-même : "Tu n'es pas à la hauteur, ça ne va pas marcher. Tu ne vas pas réussir à le satisfaire, sur le plan affectif comme sur le plan sexuel". Puis les sensations disparaissent peu à peu et laissent place à l'angoisse. C'est comme ça que je sape systématiquement toutes mes relations depuis que j'ai 16 ans. C'est un mécanisme de défense, je crois. Je ne sais pas trop comment y remédier. Cela dit, lorsque je lâche un peu l'emprise que j'ai sur moi-même et que je décide de faire confiance à l'autre (et de me faire confiance à moi), je peux passer de merveilleux moments avec l'autre, affectivement et sexuellement parlant. Avec mon copain actuel, on a vécu plusieurs mois pendant lesquels ça allait super bien. Mais dès que le stress revient, que j'ai des choses à faire, qu'un évènement perturbe tout ça, je replonge dans un cercle vicieux d'angoisse. Un rapport sexuel se passe moins bien que prévu ? Je sais que ça arrive, mais ça me fait stresser. Et je remets toute ma vie sexuelle en question sur le coup.

TiProust a écrit :
il y a 4 ans
A ce stade-là, j'ai presque envie de dire que tu ne seras sans doute pas facilement apaisée tant que tu ne te seras pas fait, par toi-même, une idée. Peut-être seras-tu déçue, peut-être trouveras-tu au contraire un diapason avec une femme. Il me semble en tout cas que tant que tu resteras sur un schéma de fantasme hyper-puissant, il te sera difficile de trouver l'équilibre que tu recherches, d'autant que ça peut, par la suite, devenir très compliqué à gérer dans l'hypothèse par ex où tu t'installerais dans une relation durable avec un homme. Donc, je dirais que ça vaut largement la peine (à condition que tu te sentes pleinement à l'aise pour le faire) d'explorer ce côté-là.


Je suis parfaitement d'accord ! Ces derniers temps, j'ai un peu exclu (temporairement) l'éventualité d'une expérience avec une femme, parce que :
1. Je me suis beaucoup investie dans ma relation avec mon copain actuel ;
2. Il y a un an, j'ai décidé que je séparais le "problème" en deux : d'un côté, il y a mon orientation sexuelle, qui est un pseudo-problème (car l'orientation sexuelle, c'est pas grave, ou du moins ça ne devrait pas l'être) ; et de l'autre, il y a le fait que mon orientation sexuelle soit devenue obsessionnelle, ce que je ne trouvais pas normal. J'ai donc décidé de soigner d'abord le côté obsessionnel, et d'explorer ma sexualité lorsque je me sentirais mieux.

Aujourd'hui, je vais mieux justement, et c'est pourquoi je me sens beaucoup plus ouverte à l'éventualité d'une telle expérience. Reste à choisir les bonnes circonstances, le bon moment...

Merci encore en tout cas !

Farde
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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par Farde » il y a 4 ans

Biscuit a écrit :
il y a 4 ans
J'ai lu avec attention ton témoignage et tout comme mon camarade TiProust, je pense que tu devrais explorer concrètement ton côté lesbien. Pas n'importe comment bien sûr, mais ça tu le dis déjà très bien toi même.
En tout cas ton récit traduit assez bien ton mal être et tes angoisses, et j'espère que tu vas pouvoir avancer et parvenir à vivre pleinement ta vie affective autant que sexuelle, sans l'angoisse permanente de faire fausse route. On a tous des doutes, à différents moments de notre vie, et rien n'est jamais figé même si parfois on peut le croire, mais dans ton cas ces doutes t'angoissent, et tu dois trouver pourquoi, ou du moins les atténuer et peu à peu t'en libérer.
Salut Biscuit, merci beaucoup pour ton message et tes encouragements ! J'ai déjà pas mal travaillé sur l'angoisse et ça va beaucoup mieux de ce côté-là. J'ai des interrogations qui reviennent régulièrement sur le tapis (à chaque fois que je rencontre un homme qui me plaît, bizarrement), mais rien de trop existentiel. Preuve que j'ai déjà avancé un peu au moins ! Je te remercie en tout cas, et te souhaite une bonne journée. :)

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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par TiProust » il y a 4 ans

Farde a écrit :
il y a 4 ans
Salut TiProust, merci beaucoup pour ta réponse à la fois sympathique et apaisante. Je vais rebondir dessus pour dérouler le fil.


content que ça t'aide un peu :)
Farde a écrit :
il y a 4 ans
...Quoiqu'il en soit, je conserve une certaine fascination pour le sexe. C'était tabou chez moi, dans ma famille et avec mes amis. Mais quand j'en vois comment certain.e.s auteur.e.s en parlent, comment certaines personnes "ordinaires", maintenant, en parlent, ça me gêne un peu et m'excite à la fois. Et, tout comme j'ai fait tomber la peur qui entourait la danse, ou la musique, ou la sociabilisation, j'ai envie de faire tomber la peur qui entoure ma sexualité. Donc je ne sais pas encore si le sexe est vital pour moi ; pour l'instant, c'est la fascination que je nourris pour le sexe qui est vitale - et elle l'est justement parce qu'elle m'incite à sortir de la peur, qui est synonyme de mort. Tu vois ce que je veux dire ?
oui assez bien :wink:

la sexualité n'est pas qu'une somme d'instincts "animaux" (heureusement). C'est, je crois, une forme de langage par lequel nous cherchons à nous exprimer et à dialoguer avec un autre être. Il est assez normal que cela apparaisse comme effrayant, parfois. Mais comme tout langage, quand on parvient à mettre la peur de côté, on s'exprime mieux, on écoute mieux l'autre et du coup, les choses se passent bien.

Et pour réagir sur un autre de tes commentaires, effectivement, l'orientation en elle-même n'est pas forcément la question essentielle. Tout au plus, je dirais que nous parlons mieux ce langage de la sexualité avec une personne correspondant à notre orientation "fondamentale", mais que nous arrivons quand même aussi à "causer" avec quelqu'un qui ne l'est pas. C'est d'ailleurs pour cela que la bisexualité est une des possibilités. Certains étant très doués dans toutes les langues :twisted:

Après, quand j'évoquais la "vitalité", je faisais référence implicitement au fait que, pour certaines personnes, y compris en couple, la sexualité est parfois considérée comme quelque chose d'un peu secondaire. Le plus compliqué étant la cohabitation entre deux personnes qui ne ressentent pas du tout cet aspect de la vie avec la même intensité. Et, en général, celui des deux qui souffre le plus et celui/celle qui ressent ce besoin vital de sexualité.

Farde
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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par Farde » il y a 4 ans

TiProust a écrit :
il y a 4 ans

la sexualité n'est pas qu'une somme d'instincts "animaux" (heureusement). C'est, je crois, une forme de langage par lequel nous cherchons à nous exprimer et à dialoguer avec un autre être. Il est assez normal que cela apparaisse comme effrayant, parfois. Mais comme tout langage, quand on parvient à mettre la peur de côté, on s'exprime mieux, on écoute mieux l'autre et du coup, les choses se passent bien.

Et pour réagir sur un autre de tes commentaires, effectivement, l'orientation en elle-même n'est pas forcément la question essentielle. Tout au plus, je dirais que nous parlons mieux ce langage de la sexualité avec une personne correspondant à notre orientation "fondamentale", mais que nous arrivons quand même aussi à "causer" avec quelqu'un qui ne l'est pas. C'est d'ailleurs pour cela que la bisexualité est une des possibilités. Certains étant très doués dans toutes les langues :twisted:
J'aime bien ta comparaison avec le langage. J'ai remarqué que, lorsque je buvais une pinte, je m'exprimais beaucoup mieux en anglais avec les Anglais. Et je m'exprime beaucoup mieux sexuellement, aussi (avec mes partenaires, pas avec les Anglais... sauf si j'ai un partenaire anglais). Bref, ne vous rendez pas dépendant.e.s de l'alcool pour avoir de meilleurs rapports sexuels, c'est une mauvaise chose. Mais c'est vrai que le stress et l'inhibition jouent un rôle similaire dans les deux cas.
TiProust a écrit :
il y a 4 ans

Après, quand j'évoquais la "vitalité", je faisais référence implicitement au fait que, pour certaines personnes, y compris en couple, la sexualité est parfois considérée comme quelque chose d'un peu secondaire. Le plus compliqué étant la cohabitation entre deux personnes qui ne ressentent pas du tout cet aspect de la vie avec la même intensité. Et, en général, celui des deux qui souffre le plus et celui/celle qui ressent ce besoin vital de sexualité.
Oh d'accord, je vois mieux ce que tu veux dire. Justement, je suis peut-être du côté de celleux qui voient la sexualité comme quelque-chose d'assez secondaire dans un couple (du moins, pour l'instant, et dans un couple hétéro), même si j'apprécie les rapports sexuels (et "causer" avec l'autre de cette manière, comme tu le dis si bien). Je crois que j'en souffre un peu, car la sexualité est tellement valorisée dans notre société que ça me renvoie une image de moi-même un peu coincée, un peu frigide (je dramatise sans doute, as always). Mais c'est peut-être parce que j'ai rencontré pas mal de "jouisseurs", qui semblaient tellement à l'aise et croquaient tellement la vie à pleines dents que j'en étais un peu envieuse. Ca m'a donné envie d'exprimer mon côté "jouisseuse", en tout cas (ou, du moins, de voir si une telle chose pouvait exister chez moi). Et ça m'a aussi amenée à remettre en question la relation de couple traditionnelle ces derniers temps, parce que j'aime bien la manière dont les polyamoureux.se.s et les anarchistes relationnel.le.s voient les choses. Sur le plan sexuel, en tout cas, ça me mettrait beaucoup moins de pression de savoir que l'autre est libre, qu'iel peut aller chercher du sexe ailleurs et n'est pas obligé.e de compter sur moi en toutes circonstances. Sur le plan affectif aussi, j'ai l'impression de cultiver tellement de relations différentes qui me semblent toutes aussi précieuses les unes que les autres... Je ne fais d'ailleurs pas de distinction claire entre l'amour et l'amitié, pour moi les deux s'interpénètrent : les deux langages ont des mots en commun !


Voilà, je suis désolée pour les pavés, mais ça me fait du bien de dérouler tout ça, de mettre mes idées à plat. Dans ma tête, ça tourne alors qu'ici, tout file en ligne droite comme sur l'autoroute. Je n'exige pas de réponse, bien entendu, mais en tout cas ça m'a fait plaisir de pouvoir dialoguer ici.

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Re: Confessions nocturnes : schéma qui se répète et sentiment de contradiction

Message par TiProust » il y a 4 ans

Farde a écrit :
il y a 4 ans
... Je crois que j'en souffre un peu, car la sexualité est tellement valorisée dans notre société que ça me renvoie une image de moi-même un peu coincée, un peu frigide (je dramatise sans doute, as always). Mais c'est peut-être parce que j'ai rencontré pas mal de "jouisseurs", qui semblaient tellement à l'aise et croquaient tellement la vie à pleines dents que j'en étais un peu envieuse. Ca m'a donné envie d'exprimer mon côté "jouisseuse", en tout cas (ou, du moins, de voir si une telle chose pouvait exister chez moi). Et ça m'a aussi amenée à remettre en question la relation de couple traditionnelle ces derniers temps, parce que j'aime bien la manière dont les polyamoureux.se.s et les anarchistes relationnel.le.s voient les choses. Sur le plan sexuel, en tout cas, ça me mettrait beaucoup moins de pression de savoir que l'autre est libre, qu'iel peut aller chercher du sexe ailleurs et n'est pas obligé.e de compter sur moi en toutes circonstances. Sur le plan affectif aussi, j'ai l'impression de cultiver tellement de relations différentes qui me semblent toutes aussi précieuses les unes que les autres... Je ne fais d'ailleurs pas de distinction claire entre l'amour et l'amitié, pour moi les deux s'interpénètrent : les deux langages ont des mots en commun !


Voilà, je suis désolée pour les pavés, mais ça me fait du bien de dérouler tout ça, de mettre mes idées à plat. Dans ma tête, ça tourne alors qu'ici, tout file en ligne droite comme sur l'autoroute. Je n'exige pas de réponse, bien entendu, mais en tout cas ça m'a fait plaisir de pouvoir dialoguer ici.
bonsoir :)
coincée, frigide... ce sont aussi des étiquettes à mon avis. Qu'on se colle soi-même souvent parce que précisément, la référence à une "norme" nous y conduit. Ca vaut aussi pour les mecs, je pense. On est tous le "coincé" de quelqu'un, d'une certaine façon.
Sur la sexualité valorisée, je ne suis pas si sûr. Il y a plein d'études qui semblent indiquer un paradoxe : oui on parle beaucoup plus de sexualité (remarque de vieux c... de mon âge : j'aurais eu Youtube ou un truc de ce genre à l'adolescence, ça m'aurait peut-être aidé par rapport à l'homosexualité, mais bref...) mais pas certain que ça rende la chose plus facile. Parole de psy (que j'ai fréquentée) : "le sexe reste le sujet tabou par excellence dans les couples". Ca ne devrait pas, et pourtant...
Je pense surtout qu'une grosse partie des difficultés vient de la difficulté à oser parler : de ses envies, de ses désirs, de notre désir d'entendre le/la partenaire exprimer les siens. D'oser aussi s'exposer, d'oser le "risque" (je vais essayer ça, peut-être que : ça va me plaire, lui plaire...).
Un gros manque d'indulgence envers soi et l'autre : c'est pas une science exacte, juste la plus humaine, la plus belles des expériences de partage.
Je crois qu'à ce jeu, les plus heureux sont ceux qui acceptent ce "risque".
Ce qui fait peur, c'est la nudité morale que ça exige. Etre sincère, dans la sexualité, c'est être exposé tel qu'on est. C'est pas évident, ça suppose une énorme confiance, ou le goût de l'aventure.
Sur ce que tu dis à propos des différentes formes de relation possibles, je partage. Même si ça ne convient pas à tout le monde, mais effectivement, pour concevoir un couple, ce sont des questions qui devraient être posées, plutôt que d'être condamné au schéma un peu bête : je te "trompe" tu me trompes. Non : c'est toi qui te trompes tout seul (ou toute seule) :wink:

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